SALVAGNAC

Une brève histoire de Salvagnac par Jean Lauzeral

 

Quatre épisodes du passé de cette ancienne « ville forte »

 

 Origine et influence romaine

Dans sa monographie du canton de Salvagnac publiée en 1866, Elie Rossignol, historien régional, écrit que le Tescou qui coule au bas de Salvagnac a pour origine le nom du peuple gaulois qui vivait dans cette région : le peuple des « Tasconis ». Cette affirmation est aujourd’hui remise en cause.

En revanche, il est quasiment certain que le nom de Salvagnac a pour origine le nom d’un personnage romain « Silvanus » dérivé de « Sivanus ». Alfred Caraven-Cachin, homme de lettres, mais aussi archéologue, qui a vécu à Salvagnac de 1883 à 1903 a fait de nombreuses découvertes qui permettent de confirmer une influence romaine à Salvagnac et ses alentours.

Il a mis à jour des débris de poteries, de tuiles et de briques, mais aussi des monnaies romaines à Beauvais sur Tescou, Montdurausse, Montgaillard et Saint-Gérard dans la commune de Lisle sur Tarn.

 

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Fief des Comtes de Toulouse

Raimond III Pons Comte de Toulouse meurt en 950 et c’est sa veuve Garsinde qui administrera ses biens. Garsinde fera, avant sa mort, de nombreuses donations consignées dans un codicille (testament) rédigé vers 972-974. Par cet acte elle donne son domaine de Salvagnac « villam meam quem vocant Selvaniaco » à Frotaire, évêque de Cahors. Au décès de celui-ci, le domaine reviendra à l’abbaye Saint-Michel de Gaillac. Ce document laisse supposer que dés le Xe siècle, le fief de Salvagnac appartenait à la maison de Toulouse.

En 1209, Raimond VI donne à son frère Baudoin une part de l’héritage qu’il avait reçu de Raimond V son père, à savoir la vicomté de Bruniquel et la seigneurie de Salvagnac ; ce qui explique qu’au printemps 1211, Baudoin ayant pactisé avec Simon de Montfort, Salvagnac passe sous l’autorité de ce dernier qui avait engagé une campagne pour s’emparer des fiefs des Comtes de Toulouse situés sur la rive droite du Tarn. A la fin de l’été 1211, Baudoin est chassé de Salvagnac et Raimond VI récupère son fief.

Par la suite, Raimond VI fait en 1220 des donations aux Bénédictins de Saint-Michel de Gaillac qui fondent un prieuré simple à Salvagnac, très certainement pour surveiller les domaines qu’ils y possédaient.

Enfin, le 4 Décembre 1224, Raimond VII vient dans le château de Salvagnac pour conclure le mariage de son frère naturel Bertrand avec Comtoresse, fille de Mainfroi de Rabastens. Et ce même jour, il fait donation à Bertrand des Vicomtés de Bruniquel et de Monclar ainsi que de la Seigneurie de Salvagnac. Ses terres vont demeurer dans la descendance de Bertrand jusqu’en 1629, année de la mort d’Anne de Monclar dont le fils Louis avait été tué en 1622 au siège de Tonneins. On peut donc admettre que Salvagnac a appartenu à la maison de Toulouse pendant plus de six siècles.

 

Guerres de religions : siège et destruction de la ville forte

Il est admis que dès 1568, Antoine de Monclar, vicomte de Monclar et baron de Salvagnac se convertit et devient un des chefs des Réformés. Il meurt en 1572. Son fils Jean Antoine revient à la religion catholique après le massacre de la Saint-Barthélemy en août 1572, mais les Ligueurs doutèrent de sa conversion. En août 1585, les Religionnaires occupent Salvagnac, ils y demeureront jusqu’à la fin du siège l’année suivante. En novembre 1586, l’amiral de Joyeuse décide en conseil de guerre d’entreprendre le siège de Salvagnac, pour reprendre cette ville forte. Il met sur pied une armée forte de 8000 fantassins et 800 cavaliers et il va pilonner la ville avec 9 canons installés à Pelot. A l’intérieur de la ville réside une garnison de 500 soldats protestants commandés par le capitaine Penavayre. Les assiégés attendent les secours venant de Montauban qui ne peuvent arriver, car il pleut beaucoup et les chemins sont impraticables. Les conditions atmosphériques ne sont pas meilleures pour les assiégeants, des épidémies apparaissent. En définitive, un accord intervient entre assiégés et assiégeants, le siège qui avait commencé le 23 novembre est levé le 3 ou 4 décembre et les troupes protestantes quittent la ville et se retirent à Montauban.

Dés le siège terminé, le Viguier et le Syndic du diocèse entrent dans la ville et engagent sa démolition grâce aux hommes envoyés par les consuls de Lisle, ils vont faire distribuer 5579 pains entre le 6 et le 24 décembre. Le rasement de la ville et du château ne se déroulant pas assez vite, l’évêque d’Albi, Jules de Médicis, sollicite à nouveau les consuls de Lisle le 15 avril et le Parlement de Toulouse confirme le 5 mai 1587.

Il faudra attendre plus de deux siècles avant que l’emprise de la ville forte soit reconstruite. On peut penser que le château fut en partie épargné, car en août 1606, on en fit l’inventaire pièces par pièces. Quant à l’église, elle fut rendue au culte quelques années plus tard. En effet en 1629, Anne de Monclar y fut inhumée. Anne de Monclar était la dernière descendante de Bertrand, demi-frère de Raimond VII.

 

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Reconstruction et essor économique au XIXe siècle

Au cours des XVIe et XVIIe des maisons et leurs dépendances vont être construites à l’extérieur des anciens fossés de la ville, on peut en voir encore quelques une de nos jours, mais l’emprise de la ville est vide à l’exception du château et de l’église.

A l’initiative du Maire, Guillaume Druille, un projet d’occupation de cet espace vide est lancé le 14 mai 1831, des emplacements vont être vendus pour la construction de maisons d’habitation, dans un premier temps sur l’emplacement des anciens remparts, et par la suite sur l’emprise de la ville détruite. Plus tard la Halle aux grains avec en étage la Mairie est construite de 1854 à 1856 ainsi que l’école publique de garçons sur l’emplacement de l’église qui avait déjà été reconstruite sur le site de l’église actuelle en 1840. Cette église sera démolie en 1875 et remplacée par l’édifice actuel. Quant au château, il changea plusieurs fois de propriétaire avant d’être acheté en 1788 par la famille de Puységur qui le revendra à une congrégation de religieuses en 1850. Les religieuses de Saint-Joseph d’Oulias fondent une école primaire de jeunes filles avec un pensionnat, l’aile sud du château est entièrement reconstruite et l’aile nord réaménagée.

Salvagnac est chef-lieu de canton depuis 1791. Sa population connait ensuite une croissance importante : 1275 habitants en 1800, 1901 en 1851. La ville devient alors un centre d’échanges économiques important, l’artisanat et le commerce se développent. Les foires qui existaient depuis des temps immémoriaux attirent des milliers de chalands ; en 1838, un marché hebdomadaire est crée le mercredi, il rythme l’activité commerciale du bourg. Ce marché sera très réputé pour la commercialisation des volailles ; en 1904, 16800 têtes de volailles sont vendues à Salvagnac, soit 14% des ventes départementales. Ces foires et marchés connaîtront le déclin après 1950. Enfin, il faut savoir que malgré plusieurs projets le chemin de fer n’atteindra jamais Salvagnac.

Sources bibliographiques :

Dom Devic et Dom Vaissette : Histoire Générale du Languedoc Privat Toulouse 1879

Pierre Pradier : Mémoires Historiques du Village de Salvagnac 1759-1772

Elie Rossignol : Monographie du Canton de Salvagnac Albi Chaillol 1866

Jean Lauzeral : Essor d’une Commune rurale au 19eme Siècle Erès Toulouse 2002

Archives Départementales du Tarn Archives Communales

Document édité par l’association Culture et Tourisme en Pays Salvagnacois

Les Sourigous –81630 Salvagnac - Tél. 05 63 33 57 84

Edition : juin 2012